Dr Yves Rouxeville : il semble que l’on écrive beaucoup sur l’autisme. Cette pathologie est-elle pour autant bien connue ?
Dr Éric Lemonnier : Dans l’autisme, il y a beaucoup plus d’inconnues que de choses connues. C’est un sujet à la mode. Il y a une foultitude de travaux scientifiques. On peut compter sept mille publications annuelles sur l’autisme. Pour autant, peu de ces travaux ont été reproduits ce qui en tempère l’intérêt. L’autisme répond à une définition syndromique, classique en médecine. Comme dans la plupart des syndromes on retrouve un grand nombre d’étiologies, au sein desquelles la génétique a une place importante, mais aussi des facteurs environnementaux. Cependant, aucun de ces facteurs, environnementaux et génétiques, ne suffit à lui seul à expliquer la maladie : il y a toujours des situations cliniques différentes. Retenons donc l’hypothèse plurifactorielle. Je prends l’exemple de l’exposition à la Dépakine durant la grossesse. On sait aujourd’hui que ce fait peut être responsable d’autisme. Cependant, dans bien des cas, la prise de Dépakine ne s’accompagne pas d’autisme. De même pour les gènes, il y a 300 gènes impliqués, mais là encore cliniquement on observe des enfants porteurs des mêmes anomalies génétiques sans autisme, si bien qu’aujourd’hui on parle d’une constellation de gènes, d’un cocktail, d’une cascade.
Dans d’autres maladies génétiques il est difficile de retrouver une similitude de gènes connus chez les membres d’une même fratrie.
Les gènes peuvent être simples ou associés ; d’autres gènes peuvent avoir un effet facilitateur ou un effet inhibiteur. Des régions non codantes du génome interviennent dans la régulation de l’expression des gènes. Tout ceci s’avère d’une grande complexité. Pour autant est-il nécessaire, en médecine, d’avancer dans les connaissances génétiques ? D’un point de vue physiopathologique, oui sans aucun doute. D’un autre côté, il n’est pas assuré que, pour des maladies telles que les autismes, cette connaissance permette d’envisager un traitement. L’évènement génétique est responsable d’anomalies du développement du cerveau. Le cerveau poursuit cependant son développement ; il n’est donc pas assuré qu’intervenir sur cet évènement initial se traduise par une "reconstruction" du cerveau.D’autre part, le conseil génétique, lorsque l’évènement génétique n’est pas lié systématiquement à une cause, risque de déboucher sur une forme d’eugénisme et ses possibles dérives. Pour autant avancer dans les connaissances ne peut qu’être
bénéfique.
Les neurosciences apportent-elles des réponses intéressantes?
Les travaux récents en neurosciences nous apportent quantité d’informations nouvelles. La psychiatrie concerne l’activité mentale c'est-à-dire du cerveau. Penser que les progrès en psychiatrie peuvent se faire en ignorant ceux des neurosciences me semble plutôt relever de l’obscurantisme, ceci n’est en rien incompatible avec la possibilité qu’une psychothérapie patiente et adaptée puisse être bénéfique pour certains patients. Concernant l’autisme, les neurosciences apportent nombre de pistes dignes d’intérêt : permettre la rencontre entre recherche fondamentale et clinique ouvre des perspectives et représente la voie de l’avenir concernant l’autisme. Il y a quelques années lors des universités d’automne de l’ARAPI, j’ai rencontré Yehezkel Ben-Ari, fondateur de l’Institut de Neurobiologie de Méditerranée. Il y présentait ses travaux sur le rôle du gradient de chlore intracellulaire et les effets paradoxaux du Valium dans l’épilepsie.
Qu’apporte donc la recherche en sciences fondamentales ?
Yehezkel Ben-Ari a montré que les neurones sont fonctionnels dès leur apparition, cependant ils présentent un fonctionnement différent des neurones de l’adulte, notamment les neurones GABA.
Dr Éric Lemonnier : Dans l’autisme, il y a beaucoup plus d’inconnues que de choses connues. C’est un sujet à la mode. Il y a une foultitude de travaux scientifiques. On peut compter sept mille publications annuelles sur l’autisme. Pour autant, peu de ces travaux ont été reproduits ce qui en tempère l’intérêt. L’autisme répond à une définition syndromique, classique en médecine. Comme dans la plupart des syndromes on retrouve un grand nombre d’étiologies, au sein desquelles la génétique a une place importante, mais aussi des facteurs environnementaux. Cependant, aucun de ces facteurs, environnementaux et génétiques, ne suffit à lui seul à expliquer la maladie : il y a toujours des situations cliniques différentes. Retenons donc l’hypothèse plurifactorielle. Je prends l’exemple de l’exposition à la Dépakine durant la grossesse. On sait aujourd’hui que ce fait peut être responsable d’autisme. Cependant, dans bien des cas, la prise de Dépakine ne s’accompagne pas d’autisme. De même pour les gènes, il y a 300 gènes impliqués, mais là encore cliniquement on observe des enfants porteurs des mêmes anomalies génétiques sans autisme, si bien qu’aujourd’hui on parle d’une constellation de gènes, d’un cocktail, d’une cascade.
Dans d’autres maladies génétiques il est difficile de retrouver une similitude de gènes connus chez les membres d’une même fratrie.
Les gènes peuvent être simples ou associés ; d’autres gènes peuvent avoir un effet facilitateur ou un effet inhibiteur. Des régions non codantes du génome interviennent dans la régulation de l’expression des gènes. Tout ceci s’avère d’une grande complexité. Pour autant est-il nécessaire, en médecine, d’avancer dans les connaissances génétiques ? D’un point de vue physiopathologique, oui sans aucun doute. D’un autre côté, il n’est pas assuré que, pour des maladies telles que les autismes, cette connaissance permette d’envisager un traitement. L’évènement génétique est responsable d’anomalies du développement du cerveau. Le cerveau poursuit cependant son développement ; il n’est donc pas assuré qu’intervenir sur cet évènement initial se traduise par une "reconstruction" du cerveau.D’autre part, le conseil génétique, lorsque l’évènement génétique n’est pas lié systématiquement à une cause, risque de déboucher sur une forme d’eugénisme et ses possibles dérives. Pour autant avancer dans les connaissances ne peut qu’être
bénéfique.
Les neurosciences apportent-elles des réponses intéressantes?
Les travaux récents en neurosciences nous apportent quantité d’informations nouvelles. La psychiatrie concerne l’activité mentale c'est-à-dire du cerveau. Penser que les progrès en psychiatrie peuvent se faire en ignorant ceux des neurosciences me semble plutôt relever de l’obscurantisme, ceci n’est en rien incompatible avec la possibilité qu’une psychothérapie patiente et adaptée puisse être bénéfique pour certains patients. Concernant l’autisme, les neurosciences apportent nombre de pistes dignes d’intérêt : permettre la rencontre entre recherche fondamentale et clinique ouvre des perspectives et représente la voie de l’avenir concernant l’autisme. Il y a quelques années lors des universités d’automne de l’ARAPI, j’ai rencontré Yehezkel Ben-Ari, fondateur de l’Institut de Neurobiologie de Méditerranée. Il y présentait ses travaux sur le rôle du gradient de chlore intracellulaire et les effets paradoxaux du Valium dans l’épilepsie.
Qu’apporte donc la recherche en sciences fondamentales ?
Yehezkel Ben-Ari a montré que les neurones sont fonctionnels dès leur apparition, cependant ils présentent un fonctionnement différent des neurones de l’adulte, notamment les neurones GABA.