Cancer - Eau du robinet et cancer: quels sont les risques ?

"Nous ne voulons pas faire peur aux gens", déclare, mardi 23 juin, David Servan-Schreiber dans une interview au Parisien/Aujourd'hui en France à propos de sa nouvelle campagne sur la nocivité de l'eau du robinet. Pourtant, c'est bien la sensation qui se dégage de ses propos. Associé au WWF (Fonds mondial pour la nature), le psychiatre, auteur du best-seller Anticancer, lance une nouvelle campagne contre le cancer."



"Tout comme on doit faire attention à l'eau qu'on donne à un nourrisson, il faut faire attention à l'eau qu'on donne à une personne dont la santé est fragilisée par une maladie comme le cancer", explique David Servan-Schreiber sur son blog. Dans le même temps il reconnaît que l'eau du robinet est "globalement bonne en France". Les préconisations concrètes qu'il met en avant ne vont pas beaucoup plus loin que celles émises, de longue date, par le Cieau (Centre d'information sur l'eau), un organisme chargé d'informer le grand public : vérifier les taux de nitrate dans l'eau de sa commune et, s'ils sont excessifs, privilégier l'eau en bouteille ou utiliser des filtres.

Mais certains cancérologues, comme le Pr Serge Hercberg, spécialiste d'épidémiologie de la nutrition et directeur de Nutrinet, la grande étude lancée par les pouvoirs publics, se sont dits circonspects face aux déclarations de M. Servan-Schreiber. Le Pr Hercberg souligne que l'on a "rarement des certitudes dans ce domaine" : "Personne ne peut dire qu'un aliment à lui seul est une cause de cancer." Monique Chotard, directrice du Cieau, dénonce elle aussi une confusion entre la qualité de l'eau du robinet et celle des ressources (rivières, nappes phréatiques...).


Reste que la présence de nitrates dans l'eau dépasse parfois les normes autorisées. Le problème est plus présent dans les zones rurales que dans les villes. "C'est un peu deux poids deux mesures", dénonce Cyril Deshayes, responsable du pôle eau douce au WWF. L'eau est bien l'aliment le plus contrôlé en France, mais certaines communes de moins de 2 000 habitants, pour des questions de coût, ne connaissent qu'un à deux contrôles de qualité par an.

C'est sur ce point, ainsi que sur l'impact environnemental, que souhaite appuyer le WWF à travers cette campagne. "On se rend compte que dans certaines régions, les nitrates et d'autres produits chimiques jouent le rôle de perturbateurs endocriniens, voire déclenchent des cancers", explique Cyril Deshayes. "Il faut donc développer une approche transversale de la pollution de l'eau", plaide-t-il. C'est-à-dire prendre davantage en compte l'environnement dans les politiques de santé publique, en purifiant l'eau avant qu'elle ne soit rejetée dans la nature et pas uniquement lors de son captage à des fins de distribution. Un combat légitime, reconnaît Monique Chotard.

Quant au problème écologique que pose le transport des eaux minérales, dont la consommation est recommandée par David Servan-Schreiber, l'écologiste reconnaît à mot couvert la contradiction. Mais il souhaite poser le problème différemment : "Il n'y a pas de raison que des groupes industriels arrivent à protéger l'eau à Evian et qu'on ne puisse pas le faire dans le reste de la France."

Antonin Sabot


Rédigé le 24/06/2009 à 23:34 modifié le 25/06/2009


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