Entretien avec un microkinésithérapeute

« Retrouver l’empreinte des traumatismes passés pour les faire disparaître »


















Ancien chargé de cours (ostéopathie et kinésithérapie) auprès des hôpitaux de Paris, Philippe Petit exerce dans la capitale la microkinésithérapie (1), une thérapie manuelle à l’écoute des rythmes vitaux qui reflètent le fonctionnement du corps humain et les émotions qui l’animent.




A. S : Qu’est-ce que la microkinésithérapie ?


Philippe Petit : Il s’agit d’une thérapie manuelle mise au point par deux kinésithérapeutes lorrains, Daniel Grojean et Patrice Benini. Constatant que la surface de la peau était animée de frissonnements à peine perceptibles au toucher, ils se sont attachés à les étudier et à en dresser une cartographie précise.




A. S.: Dans quel but ?


Philippe Petit : En fait, ces rythmes, souples, reflètent la bonne santé de nos tissus en surface comme en profondeur. Le fait qu’ils se raidissent voire disparaissent, traduit une souffrance, est le signe d’un trouble, d’une lésion. Et l’endroit où la peau se fige diffère selon la nature du problème. Par exemple, l’absence de frémissement à la base du cou indique l’origine infectieuse d’un mauvais fonctionnement intestinal. La cartographie dressée par les inventeurs de la microkinésithérapie répertorie les correspondances entre ces rythmes vitaux et les organes ou les tissus internes.




A. S.: Concrètement, comment se passe une séance ?


Philippe Petit : Le thérapeute déplace ses mains au-dessus du corps de la personne restant habillée, sa formation lui permet de percevoir les zones où la peau se fige. Grâce à la cartographie établie par les fondateurs de la technique, il identifie l’événement fauteur de trouble, et peut même le dater avec une précision qui étonne. La pathologie naît de ce que, à cette époque-là, le corps n’a été capable ni de faire face à l’événement ni de le gérer, il en a néanmoins conservé la trace. Retrouver cette empreinte, la faire ressurgir pour que l’organisme, cette fois, la reconnaisse et l’affronte pour la faire disparaître, voilà notre rôle.




A. S.: Une fois les lésions identifiées, comment se passe le traitement ?


Philippe Petit : Il est exclusivement manuel. En laissant ses mains posées à l’endroit où il a détecté une résistance, le thérapeute sollicite la capacité de l’organisme à reconnaître cette cicatrice du passé, à l’affronter et à lui apporter, cette fois, une réponse appropriée. Si elle l’est, le rythme vital réapparaît à l’endroit qu’il avait délaissé, la peau retrouve sa souplesse et l’organisme sa santé. Cette remise en forme s’accompagne parfois transitoirement d’une augmentation des douleurs ou d’une aggravation de la problématique, de fatigue, avant de céder la place au mieux-être. Quelquefois, une à deux séances supplémentaires sont nécessaires pour renforcer les acquis.




A. S.: La microkinésithérapie serait-elle une technique réflexe comme l’est, par exemple, la réflexologie plantaire qui s’intéresse aux relations entre les organes et la plante des pieds ?


Philippe Petit : Non, on n’est pas dans un phénomène réflexe mais dans la recherche d’une cause capable d’expliquer des symptômes. Cette méthode considère l’être humain comme la somme des acquisitions réalisées depuis la bactérie, il y a 4 milliards d’années, jusqu’à nos jours, pour survivre aux agressions du milieu extérieur. À la manière d’une poupée russe, l’homme a intégré les mécanismes de défense des organismes qui ont peuplé la planète : du ver au vertébré, en passant par le crabe… Ainsi, une entorse est une réaction propre au stade invertébré (par exemple, le crabe qui, ne possédant pas de squelette, réagit à une torsion inappropriée en se désarticulant).

Pour trouver l’événement lésionnel à l’origine d’un trouble, il est nécessaire de tenir compte de cette phylogénèse [histoire évolutive des espèces, des lignées et des groupes d’organismes, ndlr].




A. S.: En ce qui concerne les affections dermatologiques, vous en voyez souvent ?


Philippe Petit : 20 à 25 % des personnes qui nous consultent présentent des problèmes de peau : urticaire, psoriasis, eczéma… Certains sont liés à des émotions ou des difficultés qualifiées de psychosomatiques. Je me souviens d’un monsieur de 58 ans, affligé d’un urticaire géant, qui venait d’être licencié fort peu civilement de l’entreprise dans laquelle il travaillait depuis plus de vingt ans. Mais ce n’est pas tant la rupture, au sens de choc, qui affectait cet homme, que le sentiment d’avoir été évincé de son territoire, une notion touchant dans le cerveau la zone du paléocortex apparue chez les reptiliens. J’ai retrouvé chez lui, grâce à la cartographie, une lésion de l’ectoblaste, l’un des trois tissus provenant de l’organisation de l’embryon et qui donne naissance justement au tissu nerveux (dont le cerveau).


Cette nouvelle expérience a réveillé des rivalités de territoire, qu’il avait autrefois mal gérées, ce qui a déclenché une réaction d’ordre allergique.




A. S.: Les effets de la microkinésithérapie ont-il été évalués ?


Philippe Petit : Oui, à diverses reprises et sur des pathologies aussi variées que la colopathie fonctionnelle, les lombalgies et les problèmes dermatologiques. Deux évaluations, menées en Belgique(2), ont concerné une centaine de personnes atteintes de psoriasis. Dans 60 à 65 % des cas, leurs démangeaisons ont fortement diminué et la surface atteinte par la maladie a régressé. Une autre étude, portant sur une quinzaine d’enfants affectés d’eczéma, a conclu à une disparition des lésions chez neuf jeunes, une atténuation chez les autres sauf deux qui n’ont vu aucun résultat. Et à J+30, l’état général des enfants était meilleur que sous médicaments. Je pourrais encore vous citer une expérience menée au Centre de rééducation des grands brûlés de la région lyonnaise (sur des enfants) visant à démontrer l‘action de la microkinésithérapie sur l’atténuation des cicatrices. Et enfin, une autre, qui a eu lieu à Madagascar auprès des lépreux. Associée au traitement médical classique chez ce type de malades, la méthode a eu d’excellents résultats.




A. S.: Cette pratique est-elle prise en charge par la Sécurité sociale ?


Philippe Petit : Pas du tout. Par contre certaines complémentaires-santé offrent un remboursement partiel de ces actes. Le prix d’une consultation est très variable d’une ville à une autre, il est souvent aligné sur celui des homéopathes ou des ostéopathes.






Source : limpatient.wordpress.com


Rédigé le 04/06/2008 à 11:57 modifié le 16/07/2009


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