Revivre sensoriellement un stress post-traumatique chronique. Dr Marik CASSARD

Entretien avec Luc Nicon.



Marik Cassard : Dans votre dernier livre, Revivre sensoriellement,  vous désignez les pertes de conscience comme causes majeures de nos dysfonctionnements  émotionnels… 
 
Luc Nicon : Aujourd’hui, il est assez clair dans la littérature  médicale qu’après un choc traumatique avec implication  physique (violences physiques accidentelles ou  provoquées : accidents, agressions, viols) ou non (exposition  à des scènes excessivement violentes ou inacceptables  psychologiquement), la majorité des personnes  développe un "état de stress post-traumatique"  (ESPT). Cependant, seulement 15 à 25 %, selon la nature  du choc traumatique, développent un stress post-traumatique  chronique.
Ce stress chronique se traduit principalement  par de l’anxiété, des angoisses, des phobies,  des paniques, des états dépressifs, de la violence et  l’abus ou la dépendance à la nourriture, à l’alcool ou autres  drogues. Pour les autres personnes, une régulation  quasi complète de leur perturbation émotionnelle intervient  dans les deux semaines à trois mois au maximum  après le choc traumatique. Cela ne signifie pas que cet  évènement ne laisse aucune trace, mais que les personnes  assument la place qu'il a prise dans leur vie. A` la  suite, elles construisent leur existence en intégrant cette  expérience. 
 
Si la régulation émotionnelle ne s’est pas faite dans les  trois mois suivant le traumatisme, les spécialistes considèrent  qu’elle ne se fera pas naturellement.
Les raisons  habituellement évoquées pour justifier l’absence de régulation  émotionnelle chez ces 15 a` 25 % de personnes  concernées sont principalement leurs antécédents (la  préexistence d’un premier choc traumatique semble déterminante)  et des caractéristiques biochimiques particulières.  En effet, concernant ce deuxième point, les  personnes présentent très systématiquement un faible  niveau de cortisol (qui sert à contenir les réponses au  stress) au moment du traumatisme.  Généralement, le stress augmente la sécrétion de corticoïdes.  En excès, cette substance est toxique pour le cerveau  et met en danger tout l’organisme. Or, quand les  stress sont vraiment violents, le cortisol, contre toute attente,  n’est pas élevé mais au contraire abaissé. Rachel  Yehuda*, spécialiste de la biologie des stress post-traumatiques, postule  que le traumatisme est capable de modifier par lui-même, de  façon sélective et définitive, le fonctionnement de certains récepteurs  aux corticoïdes dans le cerveau. Dans un état de stress post-traumatique,  le système corticotrope est hypersensible. Dans la dépression  et les stress chroniques, il est au contraire désensibilisé. 
 
Ce mécanisme commence effectivement à être connu… mais  quelle est la relation avec la perte de conscience ? 
 
Dans l'étude que j'ai consigné dans un premier livre (Tipi, 2007) portant  sur près de 300 personnes en difficulté émotionnelle, dans la  quasi-totalité des cas, lorsque ces personnes revivaient sensoriellement  une situation de stress post-traumatique chronique, elles évoquaient  une privation d’oxygène, un dysfonctionnement cardiaque,  une douleur physique trop intense ou encore une intoxication ou une  déshydratation qui les conduisaient à une perte de conscience.







Rédigé le 29/11/2013 à 16:09 modifié le 29/11/2013

Journaliste spécialisée en Médecines Alternatives et Complémentaires En savoir plus sur cet auteur

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