DE L’ÉTAT DES LIEUX DES NEUROSCIENCES
Depuis la laïcisation de la méditation, nombre de scientifiques se sont attachés à expliquer les bénéfices cognitifs et émotionnels de la pleine conscience. S’il est indéniable, et nous l’avons vu dans l’article précédent, que les recherches valident l’interconnexion entre les structures cérébrales impliquées dans la méditation, comme dans l’hypnose, il reste patent, comme le dit Corinne Isnard Bagnis, qu’« aucune étude de grande ampleur n’a à la fois vérifié l’effet de la méditation de la pleine conscience sur la rechute dépressive, ni étudié, chez les personnes concernées, les modifications anatomiques et fonctionnelles cérébrales qui s’en suivent… C’est une sorte d’analyse par transitivité qui certifie de plus en plus l’efficacité de cette approche ». En 2016, Jon Kabat-Zinn, invité au DU de Méditation et Neurosciences (YouTube), répond à une étudiante qui lui demande comment ça fonctionne : « Malgré les magnifiques travaux sur les réseaux neuronaux, finalement on ne sait pas vraiment, on a juste quelques prémices… »
Et j’estime ces affirmations de cliniciens de mindfulness rassurantes, car elles éloignent un peu cette vague médiatique qui fait dériver la méditation vers une nécessité dogmatique.
« Dans les plis de leur dogme, ils ont la sombre nuit. » Victor Hugo
Cliniquement, nous praticiens pouvons observer la pleine conscience sur une approche expérientielle vis-à-vis du sujet. Nous pouvons même conforter cette approche par les données de neurosciences. C’est souvent une approche qui nous convient. Certains peuvent être tentés par une approche inverse. Observons les structures en IRMf impliquées et défaillantes dans la bipolarité, en 2006 : diminution du volume de matière grise du cortex préfrontal et du cortex cingulaire antérieure, avec une normalité de ce dernier après traitement. Conclusion immédiate : proposer la mindfulness qui agit exactement dans le sens voulu en IRMf, pour traiter la bipolarité au mieux, ou prévenir les rechutes. Tout est prometteur et les premiers résultats des études en 2009 n’apportent pourtant pas toutes les réponses espérées, tout du moins à court terme. Il peut manquer peut-être un degré de compréhension supplémentaire sur un lien encore méconnu, une petite pièce du puzzle pour le terminer. Que de découvertes ont enrichi notre compréhension du cerveau sur lequel nous travaillons, et nous avons parfois l’impression d’être encore au début. Citons Edgar Morin : « En résolvant bien des énigmes, et en élucidant bien des processus, les neurosciences ont fait émerger un énorme mystère là où il y avait une immense inconnue. » Nous côtoyons cette quête de mesure de l’émotion, de l’empathie, du bonheur, du lâcher-prise. Avant le XVIIIe siècle, on aurait brûlé vif les prétendants à cette connaissance. Acceptons peut-être de se donner du temps, ou comme disait Bateson, « nous devons réfréner notre désir de contrôler ce monde que nous contrôlons mal ».
DE L’APPLICATION EN CLINIQUE DES DÉCOUVERTES PATENTES
Objectivement nous avons par l’approche expérientielle de la méditation sur les sujets, et confortée par les études de neurosciences, la confirmation que la mindfulness améliore les capacités d’autorégulation au niveau émotionnel, au niveau attentionnel ; avec pour corollaire une diminution de l’engagement automatique de l’attention par les pensées abstraites, ainsi qu’une ouverture à l’expérience et même à l’acceptation. Par l’approche expérientielle sur les soignants, nous observons une diminution des risques de burn-out, un renforcement de la qualité thérapeutique, et une amélioration de l’empathie. Nous pouvons déjà nous contenter de ces faits, et s’approprier dans notre pratique la mindfullness. Au début du siècle précédent, la psychanalyse a confronté l’être humain à ses limites et ses moyens. Aujourd’hui les neurosciences cognitives l’invitent plutôt à les dépasser. Ce dépassement doit rester sous contrôle, mais il faut suivre cette évolution dans notre pratique.
DE LA RELATION ENTRE HYPNOSE ET MÉDITATION
Quel rapport peut-il y avoir entre l’hypnose et la méditation, en apparence différentes ? Christophe André en 2018, à l’AFEHM, nous a fait le plaisir de se risquer à un comparatif. Je vous livre son tableau (d’après C. André, 2018)
Cet essai est courageux : il résume bien les similitudes, et les différences potentielles. Remarquons toutefois qu’il n’y a pas dans ce tableau de comparatif entre l’état de transe, l’état d’induction et l’état de méditation. Dans la littérature, nous ne trouvons pas d’étude sur l’utilisation combinée de la méditation avec l’hypnose, sauf peut-être celle d’Aladin et al. (2014). Cet te étude rappel le que la pleine conscience est une manière très simple pour se rapprocher de l’expérience, pour ne pas s’accrocher aux pensées, sentiments enracinés dans la réalité de la souffrance. Aladin propose par l’hypnose d’entraîner le sujet aux libérations de pensées parasites. Cette démarche est intéressante, et il nous faut quand même préciser que le rôle d’un instructeur MBSR ou MBCT est dévolu à cet apprentissage.
Depuis la laïcisation de la méditation, nombre de scientifiques se sont attachés à expliquer les bénéfices cognitifs et émotionnels de la pleine conscience. S’il est indéniable, et nous l’avons vu dans l’article précédent, que les recherches valident l’interconnexion entre les structures cérébrales impliquées dans la méditation, comme dans l’hypnose, il reste patent, comme le dit Corinne Isnard Bagnis, qu’« aucune étude de grande ampleur n’a à la fois vérifié l’effet de la méditation de la pleine conscience sur la rechute dépressive, ni étudié, chez les personnes concernées, les modifications anatomiques et fonctionnelles cérébrales qui s’en suivent… C’est une sorte d’analyse par transitivité qui certifie de plus en plus l’efficacité de cette approche ». En 2016, Jon Kabat-Zinn, invité au DU de Méditation et Neurosciences (YouTube), répond à une étudiante qui lui demande comment ça fonctionne : « Malgré les magnifiques travaux sur les réseaux neuronaux, finalement on ne sait pas vraiment, on a juste quelques prémices… »
Et j’estime ces affirmations de cliniciens de mindfulness rassurantes, car elles éloignent un peu cette vague médiatique qui fait dériver la méditation vers une nécessité dogmatique.
« Dans les plis de leur dogme, ils ont la sombre nuit. » Victor Hugo
Cliniquement, nous praticiens pouvons observer la pleine conscience sur une approche expérientielle vis-à-vis du sujet. Nous pouvons même conforter cette approche par les données de neurosciences. C’est souvent une approche qui nous convient. Certains peuvent être tentés par une approche inverse. Observons les structures en IRMf impliquées et défaillantes dans la bipolarité, en 2006 : diminution du volume de matière grise du cortex préfrontal et du cortex cingulaire antérieure, avec une normalité de ce dernier après traitement. Conclusion immédiate : proposer la mindfulness qui agit exactement dans le sens voulu en IRMf, pour traiter la bipolarité au mieux, ou prévenir les rechutes. Tout est prometteur et les premiers résultats des études en 2009 n’apportent pourtant pas toutes les réponses espérées, tout du moins à court terme. Il peut manquer peut-être un degré de compréhension supplémentaire sur un lien encore méconnu, une petite pièce du puzzle pour le terminer. Que de découvertes ont enrichi notre compréhension du cerveau sur lequel nous travaillons, et nous avons parfois l’impression d’être encore au début. Citons Edgar Morin : « En résolvant bien des énigmes, et en élucidant bien des processus, les neurosciences ont fait émerger un énorme mystère là où il y avait une immense inconnue. » Nous côtoyons cette quête de mesure de l’émotion, de l’empathie, du bonheur, du lâcher-prise. Avant le XVIIIe siècle, on aurait brûlé vif les prétendants à cette connaissance. Acceptons peut-être de se donner du temps, ou comme disait Bateson, « nous devons réfréner notre désir de contrôler ce monde que nous contrôlons mal ».
DE L’APPLICATION EN CLINIQUE DES DÉCOUVERTES PATENTES
Objectivement nous avons par l’approche expérientielle de la méditation sur les sujets, et confortée par les études de neurosciences, la confirmation que la mindfulness améliore les capacités d’autorégulation au niveau émotionnel, au niveau attentionnel ; avec pour corollaire une diminution de l’engagement automatique de l’attention par les pensées abstraites, ainsi qu’une ouverture à l’expérience et même à l’acceptation. Par l’approche expérientielle sur les soignants, nous observons une diminution des risques de burn-out, un renforcement de la qualité thérapeutique, et une amélioration de l’empathie. Nous pouvons déjà nous contenter de ces faits, et s’approprier dans notre pratique la mindfullness. Au début du siècle précédent, la psychanalyse a confronté l’être humain à ses limites et ses moyens. Aujourd’hui les neurosciences cognitives l’invitent plutôt à les dépasser. Ce dépassement doit rester sous contrôle, mais il faut suivre cette évolution dans notre pratique.
DE LA RELATION ENTRE HYPNOSE ET MÉDITATION
Quel rapport peut-il y avoir entre l’hypnose et la méditation, en apparence différentes ? Christophe André en 2018, à l’AFEHM, nous a fait le plaisir de se risquer à un comparatif. Je vous livre son tableau (d’après C. André, 2018)
Cet essai est courageux : il résume bien les similitudes, et les différences potentielles. Remarquons toutefois qu’il n’y a pas dans ce tableau de comparatif entre l’état de transe, l’état d’induction et l’état de méditation. Dans la littérature, nous ne trouvons pas d’étude sur l’utilisation combinée de la méditation avec l’hypnose, sauf peut-être celle d’Aladin et al. (2014). Cet te étude rappel le que la pleine conscience est une manière très simple pour se rapprocher de l’expérience, pour ne pas s’accrocher aux pensées, sentiments enracinés dans la réalité de la souffrance. Aladin propose par l’hypnose d’entraîner le sujet aux libérations de pensées parasites. Cette démarche est intéressante, et il nous faut quand même préciser que le rôle d’un instructeur MBSR ou MBCT est dévolu à cet apprentissage.
Dr Olivier DE PALÉZIEUX, Praticien hospitalier en médecine d’urgence. Certifié durant ses études en psychologie médicale, il s’est passionné pour la thérapie psychanalytique, initié par le professeur René Diatkine au centre Alfred-Binet à Paris. Son intérêt pour la relation thérapeutique ne l’a jamais quitté jusque dans le domaine de l’urgence. Membre de L’IRHYS (Suisse) et de l’AFEHM où il enseigne l’hypnose, il est consultant au centre Hypnosis à Paris, tout en poursuivant son activité d’urgence en SAMU-SMUR.
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Lorsque la Version papier de ce numéro sera épuisée, la version PDF sera fournie à la place
- Èditorial : «La simplicité est la sophistication suprême»
- Ressources et compétences. B. DUBOS
- Pratiques narratives et hypnose B. DAMERON
- L’inattendu, force de changement S. LE PELLETIER-BEAUFOND
ESPACE : DOULEUR DOUCEUR
- Éditorial. H. BENSOUSSAN
- Les suggestions post-hypnotiques M. GALY
- Thérapies systémiques brèves et addictions. O. COTTENCIN
DOSSIER: HYPNOSE et MEDITATION
- Mindfulness ou pleine conscience. O. DE PALÉZIEUX
- Hypnose et méditation O. DE PALÉZIEUX
- DU de Mindfulness - Jean Sixou O. DE PALÉZIEUX
- Burn-out et méditation. M. COLOMBEL
- Dialogue socratique... O. DE PALÉZIEUX
- « Je collapse… » S. COLOMBO, MUHUC
- La présence au corps, encore A. CHABOCHE
- La hutte à sudation. N. D’INCA
- Les Grands Entretiens: Eric Bonvin. G. FITOUSSI
- Livres en Bouche S. COHEN, C. GUILLOUX
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- Èditorial : «La simplicité est la sophistication suprême»
- Ressources et compétences. B. DUBOS
- Pratiques narratives et hypnose B. DAMERON
- L’inattendu, force de changement S. LE PELLETIER-BEAUFOND
ESPACE : DOULEUR DOUCEUR
- Éditorial. H. BENSOUSSAN
- Les suggestions post-hypnotiques M. GALY
- Thérapies systémiques brèves et addictions. O. COTTENCIN
DOSSIER: HYPNOSE et MEDITATION
- Mindfulness ou pleine conscience. O. DE PALÉZIEUX
- Hypnose et méditation O. DE PALÉZIEUX
- DU de Mindfulness - Jean Sixou O. DE PALÉZIEUX
- Burn-out et méditation. M. COLOMBEL
- Dialogue socratique... O. DE PALÉZIEUX
- « Je collapse… » S. COLOMBO, MUHUC
- La présence au corps, encore A. CHABOCHE
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- Les Grands Entretiens: Eric Bonvin. G. FITOUSSI
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