
Christelle consulte pour trichotillomanie. Elle se tire les cheveux depuis l’âge de 15 ans. Elle a 55 ans aujourd’hui. C’est une femme sensible, distinguée, attentive à son look. Elle a un poste relativement impor- tant dans une entreprise où elle s’apprête à diriger trois personnes. Elle en dirige deux au début de nos échanges. Elle se définit comme une personne calme, aimant son travail. En fait, au cours de nos échanges, elle dira qu’elle n’apprécie pas le côté administratif qui la stresse. Elle précisera qu’elle n’est pas sûre d’elle et qu’elle a encore des choses à se prouver. En bref, elle ne se sent pas confiante dans son travail, pas sûre d’elle, alors que les autres lui disent qu’elle est compétente. Elle est séparée de son conjoint et mère d’un fils de 14 ans.
Dans quelles circonstances se tire-t-elle les cheveux ? Toutes : ennui, stress... Lorsqu’elle a les mains occupées, c’est bien. Elle envi- sage de se mettre au tricot. Dans le cadre de ses activités, elle prend le train régulièrement. Dans le train, elle lit. Elle a tendance à regarder Instagram pendant tout le temps de son voyage. Elle a aussi une tendance à l’addiction, en témoigne son goût pour l’apéro : un verre de vin, une cigarette tous les soirs.
Au cours de nos entretiens, elle changera ses habitudes et finira par ne pas prendre une cigarette systématiquement ni un verre de vin systématiquement. Elle utilise le moment en fin de journée comme un moment de détente, où elle peut prendre un verre d’eau, de jus de fruits. Nous travaillerons régulièrement en hypnose debout. Elle refait ses séances régulièrement.
Au cours des semaines qui suivent, elle sent qu’elle a moins d’anxiété, plus de confiance en elle, que des changements se produisent. Cependant, elle ne cesse pas pour autant de s’arracher les cheveux. Sur le plan capillaire elle décide d’arrêter de se teindre les cheveux, d’accepter ses cheveux tels qu’ils sont. Sa mère, lorsque la patiente était âgée de 15 ans, lui faisait des remarques sur ses cheveux et elle a entendu de façon répétée des critiques de la part de sa mère sur sa chevelure frisée. De ce fait, elle voulait en finir avec ses cheveux frisés et n’avait de cesse de leur tirer dessus. Au cours de nos échanges elle com- prendra que les remarques de sa mère ne sont pas forcément des critiques mais simplement un signe d’intérêt pour sa fille, voire un signe d’amour. Ceci intervient comme un recadrage important qui lui permet d’accepter les choses telles qu’elles sont.
Nos séances debout ont pour objectif de lui permettre de sentir son corps, de s’accepter telle qu’elle est avec ses cheveux frisés, avec son assurance et sa fragilité. Au cours de nos séances, elle se rendra compte qu’elle a acquis de l’expérience qui permet d’accroître ses compétences sociales, relationnelles et professionnelles. Voici le contenu de notre dernière séance...
- Thérapeute : « Je vous invite à rester debout, à observer au plus loin comme vous savez le faire. A voir ce que vous pouvez voir, cette belle nature, la couleur, la forme de ce que vous voyez... et puis le ciel et ses caractéristiques aujourd’hui... et puis quelque chose de plus près de vous, ses caractéristiques, ses formes... et tranquillement prendre le temps de voir ce que vous voyez tout près... peut-être un stylo, un livre, votre main... Une fois que c’est fait, vous pouvez laisser vos yeux se fermer et retrouver sur l’écran de vos paupières ce que vous venez de voir au loin. Les caractéristiques de la nature, du ciel... et tout près, ce que vous avez détaillé... Une fois encore, au loin sur l’écran de vos paupières, vous pouvez retrouver ce que vous venez de voir au loin, la nature et ses caractéristiques, et tout près ce que vous avez détaillé... Une fois encore, loin et tout près... Et juste être là, et profiter de savoir que vous êtes là... sentir vos deux pieds bien au sol, bien enracinés... comme des racines profondes, ancrées dans votre milieu, dans votre vie. Là où vous avez tellement de choses... votre fils, vos amis, votre famille, votre travail... et profiter de tout ce qui est là, tout simplement... Et sentir cet ancrage très fort, comme si vos deux pieds étaient plus lourds. Ils ne sont pas plus lourds, mais c’est juste l’attention que vous portez à vos deux pieds... accueillir les sensations dans les pieds comme vous savez déjà très bien le faire... »
« Puis laissez votre attention remonter dans les chevilles et les mollets, comme vous savez bien le faire, et vous accueillez les sensations... Vous êtes “là”... et partout où vous êtes, être là, être là et prendre soin, prendre soin d’être juste là... et où que vous soyez, ici, au bureau, seule, avec des collègues... prendre soin de tout votre être et juste être là... Sentir votre corps présent. Profiter de voir, d’entendre et de sen- tir tout votre corps vivant... Vous voyez, vous entendez grâce à vos oreilles... et vos yeux... et vous prenez soin de tout votre corps, à tout ins- tant... vous le savez, c’est votre priorité. Vous sentez vos genoux, la fluidité, la souplesse... le haut des jambes, le bassin... et vous sentez le bercement naturel lié à la respiration, ce bercement doux, agréable... et partout où vous êtes, retrouver la douceur de cette respiration... cultiver la douceur... et c’est très bien comme ça. Profiter d’entendre ce que vous entendez... »
« Et vous savez qu’il y a des tas de choses que vous savez faire : écouter, être juste, répondre, utiliser votre sensibilité... vos compétences professionnelles... savoir où vous a
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Dans quelles circonstances se tire-t-elle les cheveux ? Toutes : ennui, stress... Lorsqu’elle a les mains occupées, c’est bien. Elle envi- sage de se mettre au tricot. Dans le cadre de ses activités, elle prend le train régulièrement. Dans le train, elle lit. Elle a tendance à regarder Instagram pendant tout le temps de son voyage. Elle a aussi une tendance à l’addiction, en témoigne son goût pour l’apéro : un verre de vin, une cigarette tous les soirs.
Au cours de nos entretiens, elle changera ses habitudes et finira par ne pas prendre une cigarette systématiquement ni un verre de vin systématiquement. Elle utilise le moment en fin de journée comme un moment de détente, où elle peut prendre un verre d’eau, de jus de fruits. Nous travaillerons régulièrement en hypnose debout. Elle refait ses séances régulièrement.
Au cours des semaines qui suivent, elle sent qu’elle a moins d’anxiété, plus de confiance en elle, que des changements se produisent. Cependant, elle ne cesse pas pour autant de s’arracher les cheveux. Sur le plan capillaire elle décide d’arrêter de se teindre les cheveux, d’accepter ses cheveux tels qu’ils sont. Sa mère, lorsque la patiente était âgée de 15 ans, lui faisait des remarques sur ses cheveux et elle a entendu de façon répétée des critiques de la part de sa mère sur sa chevelure frisée. De ce fait, elle voulait en finir avec ses cheveux frisés et n’avait de cesse de leur tirer dessus. Au cours de nos échanges elle com- prendra que les remarques de sa mère ne sont pas forcément des critiques mais simplement un signe d’intérêt pour sa fille, voire un signe d’amour. Ceci intervient comme un recadrage important qui lui permet d’accepter les choses telles qu’elles sont.
Nos séances debout ont pour objectif de lui permettre de sentir son corps, de s’accepter telle qu’elle est avec ses cheveux frisés, avec son assurance et sa fragilité. Au cours de nos séances, elle se rendra compte qu’elle a acquis de l’expérience qui permet d’accroître ses compétences sociales, relationnelles et professionnelles. Voici le contenu de notre dernière séance...
- Thérapeute : « Je vous invite à rester debout, à observer au plus loin comme vous savez le faire. A voir ce que vous pouvez voir, cette belle nature, la couleur, la forme de ce que vous voyez... et puis le ciel et ses caractéristiques aujourd’hui... et puis quelque chose de plus près de vous, ses caractéristiques, ses formes... et tranquillement prendre le temps de voir ce que vous voyez tout près... peut-être un stylo, un livre, votre main... Une fois que c’est fait, vous pouvez laisser vos yeux se fermer et retrouver sur l’écran de vos paupières ce que vous venez de voir au loin. Les caractéristiques de la nature, du ciel... et tout près, ce que vous avez détaillé... Une fois encore, au loin sur l’écran de vos paupières, vous pouvez retrouver ce que vous venez de voir au loin, la nature et ses caractéristiques, et tout près ce que vous avez détaillé... Une fois encore, loin et tout près... Et juste être là, et profiter de savoir que vous êtes là... sentir vos deux pieds bien au sol, bien enracinés... comme des racines profondes, ancrées dans votre milieu, dans votre vie. Là où vous avez tellement de choses... votre fils, vos amis, votre famille, votre travail... et profiter de tout ce qui est là, tout simplement... Et sentir cet ancrage très fort, comme si vos deux pieds étaient plus lourds. Ils ne sont pas plus lourds, mais c’est juste l’attention que vous portez à vos deux pieds... accueillir les sensations dans les pieds comme vous savez déjà très bien le faire... »
« Puis laissez votre attention remonter dans les chevilles et les mollets, comme vous savez bien le faire, et vous accueillez les sensations... Vous êtes “là”... et partout où vous êtes, être là, être là et prendre soin, prendre soin d’être juste là... et où que vous soyez, ici, au bureau, seule, avec des collègues... prendre soin de tout votre être et juste être là... Sentir votre corps présent. Profiter de voir, d’entendre et de sen- tir tout votre corps vivant... Vous voyez, vous entendez grâce à vos oreilles... et vos yeux... et vous prenez soin de tout votre corps, à tout ins- tant... vous le savez, c’est votre priorité. Vous sentez vos genoux, la fluidité, la souplesse... le haut des jambes, le bassin... et vous sentez le bercement naturel lié à la respiration, ce bercement doux, agréable... et partout où vous êtes, retrouver la douceur de cette respiration... cultiver la douceur... et c’est très bien comme ça. Profiter d’entendre ce que vous entendez... »
« Et vous savez qu’il y a des tas de choses que vous savez faire : écouter, être juste, répondre, utiliser votre sensibilité... vos compétences professionnelles... savoir où vous a
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Sophie COHEN
Psychologue, pratique l’hypnose depuis plus de vingt ans. Intervient dans de nombreux instituts ou diplômes universitaires en France et à l’étranger. Directrice de l’iconographie de la revue « Hypnose & Thérapies brèves » et autrice pour les rubriques « Livres en bouche » et « Bonjour et après ».
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N°75 : Nov. / Déc. 2024 / Janv. 2025
Les interactions pour favoriser un changement
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce n°75 :
Si l’hypnose ericksonienne est une hypnose relationnelle, cela implique que le lieu d’habitation du corps soit la relation. Ainsi, lorsque la relation est vivante, le sujet vit une expérience corporelle où spontanément il accueille ses ressentis sensoriels, est en capacité de prendre des initiatives. En ce sens, le travail sur les interactions est primordial pour favoriser un changement.
. Guillaume Delannoy, dans un article très pédagogique, nous montre à partir de quatre situations cliniques – douleur psychosomatique, jalousie entre sœurs, obésité morbide, angoisse de mort et tics nerveux – comment la modification des interactions permet l’activation des processus de réassociation. L’auteur, avec la participation de Vania Torres-Lacaze, souligne l’importance du travail de co-thérapie pour rendre possible le changement.
. Delphine Le Gris nous raconte l’histoire de Sophie dont la vie est parcourue de relations insécures et qui cherche une solution à son problème d’insomnie. Elle nous décrit une séance d’hypnose avec un coffre-fort fermé à clé qui va lui permettre d’y enfermer ses ruminations et de retrouver un sentiment de protection.
. L’importance de l’humour est au centre du texte de Solen Chezalviel, dont la créativité ouvre une petite lumière dans un monde empli de noirceur.
. David Vergriete, avec sa grande expérience de prise en charge des addictions, évoque, à travers le cas de Guillaume souffrant d’alcoolisme chronique, l’importance de la qualité relationnelle et la nécessité d’interroger la question du sens et de la trajectoire existentielle.
Dans l’espace ''Douleur Douceur'', Fabrice Lakdja et Gérard Ostermann nous parlent de la remédiation antalgique. Le retraitement de la douleur vise à réattribuer la douleur à des voies cérébrales réversibles et non dangereuses et à considérer la douleur comme une fausse alarme et non comme la signature de lésions tissulaires.
. Maryne Durieupeyroux nous emmène à la rencontre de Pablo, jeune homme pris en charge en soins palliatifs pour des métastases multiples. Elle utilise le ''gant magique'' et évalue les réactions du patient au fur et à mesure de son travail.
. Charles Joussellin et Gérard Ostermann : Accueillir, écouter et favoriser un effort de narration doivent être au centre de nos prises en charge. La question du sens, de l’anthropologie, sont indispensables à nos métiers de thérapeutes.
. A partir d’un atelier avec Roxanna Erickson-Klein, Evelyne Josse montre l’importance des métaphores pour focaliser l’attention du patient et remettre la vie des sujets en mouvement. Roxanna utilise la métaphore de l’embarquement à bord d’un train pendant qu’Evelyne se laisse bercer par les mots et, dans cet état de transe, développe sa créativité. Les métaphores nous incitent ainsi à reconsidérer, réélaborer et réévaluer nos expériences en ouvrant de nouvelles possibilités pour redevenir auteurs de nos vies.
. Jean-Marc Benhaiem nous décrit la manière dont il comprend la logique de l’intervention en hypnose. Il nous parle des trois modes d’être : mental, sensoriel et confusionnel. Le déséquilibre entre ces modes s’installe au sein des relations dysfonctionnelles, lorsque le sujet, pour se défendre, privilégie un mode au détriment des deux autres. A travers plusieurs situations cliniques, il fait le lien entre l’excès du mental et le contrôle excessif. Pour le thérapeute, il s’agit d’aider le patient à passer de la rigidité à la fluidité, en retrouvant un corps présent.
Les rubriques :
. Sophie Cohen : Christelle et la trichotillomanie en question
. Adrian Chaboche : La présence
. Stefano Colombo et Muhuc : Voyage
. Psychotrauma, PTR, EMDR
. Sylvie Le Pelletier-Beaufond : Le souffle de la guérison au Népal
Les interactions pour favoriser un changement
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce n°75 :
Si l’hypnose ericksonienne est une hypnose relationnelle, cela implique que le lieu d’habitation du corps soit la relation. Ainsi, lorsque la relation est vivante, le sujet vit une expérience corporelle où spontanément il accueille ses ressentis sensoriels, est en capacité de prendre des initiatives. En ce sens, le travail sur les interactions est primordial pour favoriser un changement.
. Guillaume Delannoy, dans un article très pédagogique, nous montre à partir de quatre situations cliniques – douleur psychosomatique, jalousie entre sœurs, obésité morbide, angoisse de mort et tics nerveux – comment la modification des interactions permet l’activation des processus de réassociation. L’auteur, avec la participation de Vania Torres-Lacaze, souligne l’importance du travail de co-thérapie pour rendre possible le changement.
. Delphine Le Gris nous raconte l’histoire de Sophie dont la vie est parcourue de relations insécures et qui cherche une solution à son problème d’insomnie. Elle nous décrit une séance d’hypnose avec un coffre-fort fermé à clé qui va lui permettre d’y enfermer ses ruminations et de retrouver un sentiment de protection.
. L’importance de l’humour est au centre du texte de Solen Chezalviel, dont la créativité ouvre une petite lumière dans un monde empli de noirceur.
. David Vergriete, avec sa grande expérience de prise en charge des addictions, évoque, à travers le cas de Guillaume souffrant d’alcoolisme chronique, l’importance de la qualité relationnelle et la nécessité d’interroger la question du sens et de la trajectoire existentielle.
Dans l’espace ''Douleur Douceur'', Fabrice Lakdja et Gérard Ostermann nous parlent de la remédiation antalgique. Le retraitement de la douleur vise à réattribuer la douleur à des voies cérébrales réversibles et non dangereuses et à considérer la douleur comme une fausse alarme et non comme la signature de lésions tissulaires.
. Maryne Durieupeyroux nous emmène à la rencontre de Pablo, jeune homme pris en charge en soins palliatifs pour des métastases multiples. Elle utilise le ''gant magique'' et évalue les réactions du patient au fur et à mesure de son travail.
. Charles Joussellin et Gérard Ostermann : Accueillir, écouter et favoriser un effort de narration doivent être au centre de nos prises en charge. La question du sens, de l’anthropologie, sont indispensables à nos métiers de thérapeutes.
. A partir d’un atelier avec Roxanna Erickson-Klein, Evelyne Josse montre l’importance des métaphores pour focaliser l’attention du patient et remettre la vie des sujets en mouvement. Roxanna utilise la métaphore de l’embarquement à bord d’un train pendant qu’Evelyne se laisse bercer par les mots et, dans cet état de transe, développe sa créativité. Les métaphores nous incitent ainsi à reconsidérer, réélaborer et réévaluer nos expériences en ouvrant de nouvelles possibilités pour redevenir auteurs de nos vies.
. Jean-Marc Benhaiem nous décrit la manière dont il comprend la logique de l’intervention en hypnose. Il nous parle des trois modes d’être : mental, sensoriel et confusionnel. Le déséquilibre entre ces modes s’installe au sein des relations dysfonctionnelles, lorsque le sujet, pour se défendre, privilégie un mode au détriment des deux autres. A travers plusieurs situations cliniques, il fait le lien entre l’excès du mental et le contrôle excessif. Pour le thérapeute, il s’agit d’aider le patient à passer de la rigidité à la fluidité, en retrouvant un corps présent.
Les rubriques :
. Sophie Cohen : Christelle et la trichotillomanie en question
. Adrian Chaboche : La présence
. Stefano Colombo et Muhuc : Voyage
. Psychotrauma, PTR, EMDR
. Sylvie Le Pelletier-Beaufond : Le souffle de la guérison au Népal
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