Dans deux récits cliniques de cas de patientes traumatisées, l’une anxieuse, l’autre dépressive, l’hypnose est utilisée pour que les émotions symptomatiques puissent oeuvrer à recréer un espace pour que le mouvement vital reprenne.
Peur, douleur, deuil, chagrin : n’avons-nous pas chacun nos prisons, nos enfermements, nos chaînes qui entravent le bon fonctionnement du vivant à l’intérieur de nous ? Quand nous n’allons pas bien, il n’est pas rare que les émotions s’en mêlent.
L’hypnose est un outil privilégié pour retrouver un espace de liberté et élaborer un changement de perspective qui va nous permettre de nous reconnecter à nos émotions et à notre élan vital.
« LES EMPÊCHEMENTS À VIVRE » D’ALICE
« Les mots qui naissent de la douleur savent mieux s’emparer de la vie que les mots venant d’une autre source. »
Charles Juliet
Alice a 30 ans. Un soir, elle tombe sur une émission de télévision qui raconte l’histoire d’une petite fille diabétique découvrant l’hypnose pour l’aider à surmonter les difficultés quotidiennes liées à la maladie et au traitement. Cette histoire la touche et, bien qu’elle ne soit pas diabétique ni même malade, elle ressent qu’elle aussi a besoin d’aide pour résoudre ses problèmes, qui sont « des empêchements à vivre », comme elle les désigne. Alice est ingénieure dans une société de traitement de l’eau, un milieu où elle est la seule femme à son niveau de responsabilité.
Elle souffre de crises de panique au volant depuis bientôt un an. Elle fait jusqu’à une heure de plus de trajet par jour pour éviter l’autoroute ou la voie rapide. Depuis une première crise très violente qui l’a amenée à consulter, elle a développé une sensation de claustrophobie qui n’est plus seulement liée à la conduite mais peut apparaître sur son lieu de travail, en réunion, mais aussi dans un espace qu’elle juge trop confiné ou à la cantine, endroit qu’elle identifie comme très éclairé et très bruyant. Elle est également gênée lors de la prise de parole en public car elle rougit fortement et se met à bégayer. Si elle peut reprendre le contrôle de sa voix, elle se sent devenir cramoisie, ce qui renforce son malaise (Alice est blonde aux yeux bleus, de carnation très pâle, elle a tendance à rougir facilement).
Mis bout à bout, ces symptômes qui font maintenant partie de son quotidien finissent par saper sa confiance en elle : elle sent son corps se dérober, flotter, est en proie au vertige, à la tachycardie et perd pied : « Je ne suis pas ancrée, dit-elle, une bouffée d’émotion suffit à me déstabiliser. »
« Une bouffée d’émotion », comme celle qui l’a saisie devant ce reportage à la télévision où il était question d’hypnose et d’enfant malade ?
Nous verrons que l’émotion n’est pas nécessairement une faiblesse. Ne pas pouvoir exposer son point de vue sans être débordé par une émotion trop forte peut être handicapant; mais en revanche, rester toujours « sous contrôle » aussi. Cette émotion qui l’a saisie en regardant cette émission l’a incitée à demander de l’aide à un thérapeute pratiquant l’hypnose et à découvrir ses propres ressources pour retrouver une vie plus sereine.
Alice associe l’aggravation de ses symptômes à la maternité, et surtout à la naissance de sa fille qui a aujourd’hui 10 mois. Elle a également un petit garçon de 4 ans : « Je vis dans la peur qu’il leur arrive quelque chose, surtout à ma fille. » Elle a passé son enfance à la campagne et se ressource volontiers dans la nature. Lors de notre première séance, à sa demande, nous allons aux champignons dans la forêt d’automne, un temps qu’elle goûte particulièrement. Je lui propose de respirer profondément, ayant noté qu’elle semblait être en apnée : la respiration va effectivement devenir son alliée principale, comme l’ancrage manquant.
A la deuxième séance, elle fond en larmes en abordant spontanément la question de la peur des hommes qui la renvoie à un traumatisme ancien : « J’ai subi des attouchements de la part d’un de mes oncles, j’avais 3 ans et demi. » Cet homme est le frère aîné de son père, un célibataire marginal qui était manifestement attiré par les enfants. A 27 ans, elle souffrait de vaginisme et c’est pendant une énième consultation gynécologique que ce rappel traumatique a eu lieu, ainsi que le souvenir très net de son refus de se déshabiller et d’avoir pris son bain en culotte pendant sa petite enfance. Sa mère ne la questionnait pas et peu à peu le sujet est devenu tabou dans sa famille.
Depuis qu’elle est elle-même devenue mère d’une petite fille, elle prend conscience d’une colère contre sa mère « qui n’a pas su la protéger ». La mise en mots de tous ces éléments pendant les séances de thérapie lui permet de comprendre que ce qui lui arrive aujourd’hui vient d’une blessure non soignée et qui s’est infectée. De même que l’on va aider à la guérison d’une cicatrice profonde en injectant un produit comme du collagène pour que la peau se répare, on va aider le psychisme à fabriquer un fluide réparateur qui permettra à Alice de fonctionner de manière plus écologique, moins coûteuse en énergie, et de guérir de ses symptômes les plus gênants. Un fonctionnement qui passe par une réconciliation avec les émotions qui deviennent source de vie canalisée et ne débordant plus de manière inappropriée.
Evoquer une joie en état d’hypnose la ramène à son état de grossesse, et pendant l’échographie- « le moment où j’ai entendu battre le coeur de mon enfant pour la première fois »- un moment incroyable où la vie que l’on porte en soi devient un son, un rythme, une présence. Et le battement du coeur, ce petit tambour qui mène sa propre danse, ramène au souffle qui anime le vivant.
Après un début de thérapie assez idyllique, les doutes surgissent, soulignant la difficulté à laisser faire le processus libérateur et à sortir de l’enfermement.
Alice est prise dans le dilemme entre : « Ça fait du bien de mettre des mots sur ce malaise », et puis : « Ce n’est pas la peine de faire remonter tous ces trucs-là à la surface. Je ne peux plus en parler à ma mère, lui dire que je vais voir quelqu’un. En même temps, je sens que je lui en veux et ça ne simplifie pas le relationnel entre nous. » (Alice vit en famille chez sa mère depuis quelques mois en attendant que les travaux se finissent dans sa future maison.) « Ma mère me rend beaucoup de services, elle garde les enfants quand ils sont malades, et puis elle les garde quand je viens chez vous. »
Hypnose et Thérapies Brèves n°37 Edito du Dr Thierry SERVILLAT, Rédacteur en Chef
COMME SUR UN PLATEAU. Dans moins de quatre mois : Congrès de Paris. Un moment historique arrive à grande vitesse. Déjà un très grand nombre d’inscrits, qui vont, comme dans un magnifique restaurant – on sait combien Milton Erickson appréciait cette métaphore de la vie et des choix qu’elle nous propose – avoir une bien jolie carte à regarder avant de se décider à rentrer dans telle ou telle salle de conférence, d’atelier (de pratique ou vidéo), de démonstration...
Vers de nouveaux possibles. Bruno BONAZ - Professeur à la Clinique Universitaire d’Hépato-Gastroentérologie, CHU de Grenoble. Chercheur à l’Unité Inserm U836 « Stress et Interactions Neuro-Digestives », Grenoble Institut des Neurosciences (GIN).
Dans nos contrées cartésiennes, l’arrivée des connaissances sur le système nerveux entérique a mis 20 ans. Mais maintenant, nos chercheurs sont pleinement activés pour mieux connaître le fonctionnement de ces intenses et subtils flux d’informations.
Une étude pilote est actuellement réalisée en Alsace pour évaluer l’utilité de certains outils hypnotiques dans la pratique quotidienne des « guerriers du feu » qui, rappelons-le, combattent bien d’autres dangers ! A l’heure où les C-PAP de Boussignac et autres Lifepak encombrent à juste titre nos valises, la technicité nécessaire a peu à peu minimisé l’impact sous-estimé de nos mots et bouté au second plan l’approche comportementale de nos victimes. L’avènement de Dame Morphine et sa simplicité d’emploi ont relégué le dieu Hypnos au rôle de traîne-savate, vieux barbon inutile et dépassé qui, j’en conviens, est nettement moins séduisant que notre jouvencelle efficace et véloce.
L’hypnose est habituellement déconseillée pour traiter les patients psychotiques. Sauf lorsqu’un thérapeute expérimenté et prudent propose dans un cadre sécurisé des outils innovants.Cet article présente certains des outils utilisés dans une nouvelle technique de groupe développée à la Communauté thérapeutique de Valme (Séville, Espagne); celle-ci est rattachée au Service andalou de Santé publique, intégré dans le NHS. Nous avons commencé à utiliser cette technique il y a trois ans. Les résultats, dès les premiers groupes de patients, ont été positifs tant aux niveaux psychopathologique que social et général.
Conférencière au congrès de la Rochelle, Marie-José Dumoulin a captivé son auditoire désireux d’établir des ponts entre hypnose et yoga, et a surpris dans sa simplicité lorsqu’elle a fait une séance collective de yoga nidra. L’hypnose et le yoga nidra induisent des états modifiés de conscience comparables. Le yoga nidra fait partie du « raja yoga » : yoga mental. Le yoga nidra est une méthode de relaxation profonde amenant à l’état de méditation mise au point puis diffusée aux alentours de 1960 par Swami Satyananda à partir des yoga sutras de Patanjali et de pratiques tantriques très anciennes qu’il a adaptées au monde contemporain.
Ce 20e congrès de l’ISH s’associe au 9e forum de la CFHTB.
Quelles sont pour vous les valeurs fortes, celles qui donnent toutes raisons de participer à ces deux événements majeurs pour lesquels vous vous êtes investis dans le Comité d’organisation depuis 2009 ?Claude Virot (directeur du congrès) :
Tous les professionnels de santé ayant le bonheur de pratiquer l’hypnose savent que c’est une compétence majeure pour aider nos patients. Elle crée un pont entre la médecine technique et la médecine humaniste.
Bon nombre de patients, individuels ou a fortiori en couple, nous parlent d’amour. Oui, mais comment définir celui-ci ? Y’en aurait-il différentes formes ? Si oui, lesquelles ? Etudier celles-ci est la tâche que s’est assignée Ruwen Ogien, philosophe, directeur de recherche au CNRS, et membre du Centre de Recherche Sens, Ethique, Société (CERSES Paris Descartes). Son ton est mi-naïf, mi-provocatif, ce qu’illustre bien l’image de couverture montrant un lapin et une ours qui semblent en peluche, et qui sont manifestement dans une posture propice à ce que nous appellerons un « gros câlin ».
Qu’est-ce qui vous amène à lire ce pamphlet ou, soyons sérieux, cet article ? La rédaction pourrait bien lancer une enquête afin de connaître l’opinion des lecteurs. Risqué ! Et s’il n’y avait aucun lecteur ? Cela serait chose extraordinaire pour le soussigné. Le Quiproquo n’étant lu par personne, il pourrait contenir un nombre de mots choisis au hasard dans un texte rébarbatif tel un dictionnaire ou le bottin, éventuellement, en faisant un effort, dans un texte complexe d’histoire ou de philosophie.
ommençons en signalant que l’intérêt de l’hypnose en douleur continue de se confirmer : Tan et ses collègues (2015) abordent le chapitre des dorsalgies chroniques. Trois groupes sont constitutes (séances sur 3 mois) : 8 séances de biofeedback ; 8 sessions d’apprentissage de l’autohypnose; 8 sessions d’apprentissage de l’autohypnose avec des enregistrements d’aide pour les sessions à domicile ; 2 sessions d’apprentissage de l’autohypnose avec des enregistrements d’aide pour les sessions à domicile et un appel téléphonique par semaine pour rappel des exercices à effectuer.
Depuis plusieurs jours, je voulais écrire un compte rendu sur le symposium d’ouverture de l’Institut Milton H. Erickson d’Ile de France de Christine Guilloux qui s’est tenu le 5 décembre dernier. Et je me suis réveillée ce matin de Noël, avec la surprise d’avoir eu du courrier…dans mes petits souliers ! Une lettre de Milton Erickson ! Ah, la magie de Noël ! « Chère Marion, Tu étais là, à observer, écouter…et moi aussi. Je t’envoie ce message pour que tu le distribues aux autres. Je ne sais pas si vous aviez senti ma présence dans cette salle ce jour-là. Pourtant, j’étais là à observer et écouter…
-
Hypnose spirituelle: on considère que c'est dérogatoire à l'exercice de la profession de psychologue.
-
Hypnothérapeutes en mal de patients... La faute à qui ? Aux écoles de formation, à la concurrence ?
-
Corinne et ses peurs. Sophie COHEN. Revue Hypnose et Thérapies Brèves n° 70.
-
Explorer ce qui est bon pour soi. Revue Hypnose et Thérapies Brèves n° 70.
-
La Transe Hypnotique, l’éthique et la liberté.